Craindre le regard des autres peut se manifester de diffĂ©rentes maniĂšres et s’expliquer par diffĂ©rentes difficultĂ©s, souvent liĂ©es Ă l’histoire de vie de la personne. Savez-vous exactement pourquoi vous avez peur du regard des gens ? Quel type de peur s’impose Ă vous ? Voici quelques types de peurs qui permettent d’aller un peu plus loin dans la recherche de causes et de solutions Ă votre problĂšme.
Peur de dégoûter les gens
Certaines personnes peuvent avoir une image d’elles-mĂȘmes tellement dĂ©gradĂ©e qu’elles peuvent avoir l’impression d’ĂȘtre moches, dĂ©goĂ»tantes, et le regard d’autrui sur leur corps est particuliĂšrement inconfortable. Cela peut ĂȘtre le cas quand on souffre d’une blessure d’humiliation, comme celle dĂ©crite par Lise Bourbeau. Elles peuvent donc avoir des difficultĂ©s Ă sortir, Ă se montrer, Ă parler en public, Ă avoir des rapports intimes dĂ©commplexĂ©s ou avoir des rapports intimes tout court.
Elles peuvent ne pas se rendre compte de cette peur de crĂ©er le dĂ©goĂ»t chez l’autre, et se cacher vers des “excuses” : je suis timide, je suis pudique… Ou mĂȘme se cacher en disant qu’elles ne sont pas pudiques du tout mais en rĂ©alitĂ©, leur comportement dans certaines situations montre qu’elles sont dĂ©goĂ»tĂ©es de leur corps.
Pour se libĂ©rer de cette croyance que l’on dĂ©goĂ»te les autres, que peut-on faire ? Peut-ĂȘtre dĂ©jĂ prendre conscience de ce qui se cache derriĂšre notre peur du regard des autres, d’Ă©couter ce que l’on ressent vraiment au fond de nous. Est-ce que ça nous rappelle une situation ancienne douloureuse, voire traumatisante ? Est-ce que cette situation a induit une croyance limitante comme par exemple “on m’a salie, alors je suis dĂ©goĂ»tante” ? Croyance que l’on pourrait retrouver aprĂšs diffĂ©rentes blessures : blessure d’humiliation, agression sexuelle… Et vous ? Quelle croyance limitante se cache derriĂšre vos peurs d’ĂȘtre regardĂ© par les autres ?
L’accompagnement d’un psychologue peut ĂȘtre une aide prĂ©cieuse pour se libĂ©rer de ces souffrances et se rĂ©concilier avec le regard de l’autre sur soi.
Peur d’ĂȘtre rejetĂ©
Sans forcĂ©ment qu’il y ait de raisons “rationnelles”, vous pouvez ĂȘtre confrontĂ©s Ă certaines difficultĂ©s en prĂ©sence des autres ou avant de les rencontrer. Cela peut crĂ©er une peur telle que vous pouvez avoir envie de fuir, d’annuler des rdv ou mĂȘme cela peut vous pousser Ă rejeter les autres de maniĂšre plus ou moins indĂ©licate. Vous pouvez aussi avoir une facilitĂ© Ă couper les ponts : de peur qu’on vous rejette, vous pouvez prĂ©fĂ©rez prendre les devant.
Pour vous libĂ©rer de cette peur qui peut rendre le regard des autres pesant, comme si Ă tout moment quelqu’un allait vous envoyer bouler, vous mettre Ă la porte, vous pourriez essayer de vous remĂ©morer le plus ancien souvenir ou le souvenir le plus difficile Ă propos d’une situation oĂč vous vous ĂȘtes senti rejetĂ©. Cela peut avoir Ă©tĂ© refoulĂ© dans les mĂ©andres de l’inconscient : certaines thĂ©rapies aident Ă libĂ©rer ces Ă©motions malgrĂ© tout. Si toutefois vous vous en souvenez, avez-vous l’impression d’avoir digĂ©rĂ© cette information ? Avez-vous dĂ©jĂ parlĂ© Ă cette partie de vous qui demeure blessĂ©e, pour lui dire que ce n’est pas parce qu’elle a Ă©tĂ© rejetĂ©e par une personne qu’elle aimait fort, que toutes les personnes qui allaient l’aimer aller la rejeter. Cela ne signifie pas non plus qu’elle est horrible au point de ne mĂ©riter que le rejet, de ne pas mĂ©riter l’amour, la considĂ©ration, la prĂ©sence, le soutien.
Peur d’ĂȘtre moquĂ©
Comment expliquer que certaines personnes, prenant la parole en public ou sur internet, parviennent Ă ĂȘtre tout Ă fait Ă l’aise alors que vous, craignez Ă chaque instant d’ĂȘtre moquĂ©, au point de prĂ©fĂ©rer vous taire dans certaines situations voire dans toute situation d’interaction humaine ? Peut-ĂȘtre avez-vous dĂ©jĂ vĂ©cu des situations de moquerie, d’humiliation, ces moments oĂč on n’est rabaissĂ© en public, de maniĂšre plus ou moins bousculante.
Peut-ĂȘtre que dans votre Ă©ducation, vous avez reçu l’idĂ©e qu’ĂȘtre moquĂ© ou ridiculisĂ©, c’est ĂȘtre bel et bien ridicule. Que parler devant les autres c’Ă©tait se faire humilier en public. Alors que l’on peut se moquer de vous sans que vous soyez rĂ©ellement ridicule et pas forcĂ©ment en public. Et d’ailleurs qu’est-ce que le ridicule ? Est-ce que vous auriez la croyance que vous ĂȘtes ridicule ? Que vous ĂȘtes douĂ© pour avoir “l’air con” ? Et si c’Ă©tait faux ? Si en rĂ©alitĂ©, vous Ă©tiez tout aussi digne de considĂ©ration que toute autre personne ?
Se libĂ©rer de cette peur peut demander un travail avec un psychologue ou autre praticien qui saura vous accompagner. En complĂ©ment, vous pouvez aussi mettre en pratique quelques modes de comportements que vous pensez peut-ĂȘtre ne pas avoir le droit d’avoir… et pourtant ! La prochaine fois que vous craignez d’ĂȘtre moquĂ©, que cela vous empĂȘche de vous exprimer face aux autres car vous craignez leur regard, leurs pensĂ©es et leurs rĂ©actions, envoyez-vous un message d’encouragement comme vous le feriez Ă quelqu’un que vous aimez : tu es quelqu’un de bien, tu as le droit de t’exprimer, et surtout, les moqueries des autres ne signifient pas que tu es quelqu’un qui mĂ©rite cela. Tu mĂ©rites des relations saines et la plupart des gens veulent ton bien, te respecteront.
Mais avant d’en arriver lĂ , vous pourriez avoir besoin de modifier vos croyances sur vous-mĂȘme (vous ĂȘtes dignes de respect) puis sur les autres (la plupart des gens veulent simplement que tout se passe bien, ils ne sont pas lĂ pour se moquer de vous). Vous aurez ensuite besoin de prendre conscience de certaines attitudes que vous pourriez avoir et qui donnent envie Ă des personnes de se moquer de vous. Et bizarrement, ce n’est pas parce que vous ĂȘtes habillĂ© comme un clown ou comme un clochard qu’on va se moquer de vous : c’est parce que vous craignez qu’on se moque de vous ou c’est parce que vous mĂȘme avez l’impression d’avoir l’air d’un clown.
Si vous assumez pleinement que votre tenue de “clown” vous plait, qu’elle exprime qui vous ĂȘtes, vous dĂ©gagerez une confiance en vous qui dĂ©couragera les autres de vous dĂ©stabiliser. De la mĂȘme maniĂšre, ce n’est pas parce que vous ĂȘtes gros, rachitique, que vous avez un handicap, que vous avez le visage dĂ©formĂ©, qu’on va se moquer de vous : ce sont des prĂ©textes. On se moque de vous parce qu’on a plaisir Ă dĂ©stabiliser, Ă Ă©craser. Vous gagnez, si cela ne vous blesse pas, peut-ĂȘtre mĂȘme que vous trouverez cette situation drĂŽle, tout dĂ©pend Ă©videmment.
Et vous avez raison de ne pas vous sentir concernĂ© par la moquerie car vous savez que vous n’ĂȘtes pas ridicule, vous ĂȘtes un humain comme les autres, car vous vous respectez et vous vous considĂ©rez comme quelqu’un digne de respect, ou bien car oui, vous vous trouvez ridicule, gros, moche et que vous l’acceptez car pour vous ce n’est pas un dĂ©faut d’ĂȘtre ridicule. Alors, cela ne vous touchera pas.
Peur d’ĂȘtre jugĂ©
Nous sommes dans une Ă©poque oĂč l’on prĂŽne le non jugement. Cette tolĂ©rance infinie Ă ne pas dire Ă l’autre des phrases comme “ce n’est pas bien de faire ça”. Cela pose tout de mĂȘme quelques soucis. D’abord, le jugement est Ă double sens : on peut juger quelqu’un de maniĂšre “nĂ©gative”, ce qui peut ĂȘtre culpabilisant, mais on peut aussi juger quelqu’un de maniĂšre “positive”, en disant “c’est bien ce que tu fais”.
Et pourtant, la personne se sentira tout de mĂȘme jugĂ©e. FlattĂ©e peut-ĂȘtre, mais jugĂ©e. Avec en fond sonore l’idĂ©e que si elle n’avait pas fait les choses de cette façon, on lui aurait dit que ce n’Ă©tait pas bien. Juger, ne pas juger, c’est compliquĂ©. D’autant que ce qui compte, c’est sans doute d’arrĂȘter de juger dans notre maniĂšre de penser, pas seulement dans nos propos. Si l’on s’empĂȘche de dire quelque chose parce que cela pourrait donner l’impression qu’on juge, mais qu’on n’en pense pas moins, on Ă©vite certes Ă notre interlocuteur d’entendre notre jugement (mais peut-ĂȘtre le sentira-t-il)) mais surtout l’on continue de juger et cela peut nous lĂ©ser vous-mĂȘme, en termes d’Ă©panouissement et d’Ă©quilibre Ă©nergĂ©tique.
Tout ça pour dire que si vous avez peur d’ĂȘtre jugĂ©, posez-vous dans un premier temps la question : “est-ce que je juge les autres ?”. Ecoutez-vous parler lorsque vous Ă©changez avec quelqu’un, pendant les prochains jours ou semaines, analysez vos pensĂ©es aussi. Ătes-vous en train de juger ? Est-ce que cela vous fait vibrer ? Vous agace ? Vous apaise ? Est-ce que cela crĂ©e au contraire une sorte de tension, de rancune ou d’indignation, peut-ĂȘtre mĂȘme de jalousie ? En vous libĂ©rant de cela, vous aurez sans doute moins peur d’ĂȘtre jugĂ© et cela demande il est vrai, une certaine humilitĂ©, une certaine remise en question qui n’est pas pour flatter votre Ă©go !
Peur de ne pas ĂȘtre aimĂ©
Avoir peur du regard des autres, c’est aussi avoir peur de ne pas ĂȘtre aimĂ©, ou du moins c’est ainsi que certaines personnes l’expriment. De nombreuses peurs peuvent se cacher derriĂšre cette peur de ne pas ĂȘtre aimĂ©. Car finalement, quelle importance ? Avez-vous besoin d’ĂȘtre aimĂ© par tous les gens que vous croisez ? Par le public auquel vous vous adressez ? Et si oui, alors est-ce que vous vous aimez assez ? Est-ce que vous vous apportez un soutien inconditionnel ou est-ce que vous ĂȘtes la premiĂšre personne Ă vous abandonner, Ă vous critiquer, Ă vous rejeter , Ă vous dĂ©goĂ»ter, Ă vous culpabiliser, Ă vous dĂ©truire ?
Vous l’aurez compris, la peur du regard des autres est complexe, c’est sans doute pour cela que rare sont les personnes qui parviennent Ă s’en libĂ©rer d’un seul coup et durablement. Vous pouvez vous libĂ©rer rapidement d’une premiĂšre couche d’oignon, mais sans doute pas de toutes les couches. VoilĂ pourquoi vous pouvez rencontrer des pĂ©riodes difficiles Ă ce niveau, puis des pĂ©riodes de renaissance et d’aisance, avant d’ĂȘtre Ă nouveau confrontĂ© Ă cette peur, comme si la vie vous imposait des pĂ©riodes de travail sur vous-mĂȘme, jusqu’au jour oĂč qui sait, vous n’en aurez plus jamais besoin !
Quelques pratiques
Maintenant que vous avez le cerveau farci des milliers de mots qui prĂ©cĂšdent, voici quelques pratiques qui peuvent vous aider, notamment dans les pĂ©riodes oĂč la peur du regard des autres est relativement gĂ©rable. L’idĂ©al est de vous tourner vers une pratique dans laquelle vous ĂȘtes relativement Ă l’aise, qui confronte au regard des autres mais dans une situation relativement confortable tout de mĂȘme. Ne vous mettez pas Ă parler devant 500 personnes si dĂ©jĂ devant 5 personnes vous paniquez ! Accordez-vous de la douceur dans ces expĂ©rimentations.
Cela vous aidera à reprendre confiance, à observer objectivement que les autres sans doute, ne vous veulent aucun mal, et vous pourrez ensuite passer à une pratique un peu moins confortable pour vous, et donc plus avancée dans la confrontation au regard des autres.
Le thĂ©Ăątre est un exemple de situation trĂšs confrontante et ce n’est pas forcĂ©ment le bon moment pour vous, mais peut-ĂȘtre un jour ! Ecoutez-vous. Quels sont les loisirs que vous aimeriez faire, qui vous font peut ĂȘtre un peu peur mais que vous sentez pouvoir affronter ? Peut-ĂȘtre pouvez-vous aussi commencer de nouvelles choses dans votre activitĂ© professionnelle, que vous vous ĂȘtes toujours refusĂ© par peur du regard des autres ? et si c’Ă©tait le moment ? Testez ! Vous n’ĂȘtes pas obligĂ© de faire le grand saut qui peut ĂȘtre vertigineux : tatez le terrain !